LOVE SONG / LOVE SONG: POST RUINS / BOA TARDE / ID
Stairway to Heaven ? Les marches de l’escalier mènent-elles à l’amour ? Et l’amour (du moins l’une de ses manifestations) est-il symbolisé par les photos du livret intérieur ? Et pourquoi post-ruins ? Le titre et l’illustration de la pochette du second opus solo du guitariste portugais Luis Lopes (son premier opus, uniquement en LP, s’intitulait tout simplement Love Song) apparaissent ambigus. Le premier affichait dans l’alignement de neuf pièces une vision de l’aventure amoureuse (début et fin), et son exécution une délicate sérénité, presque caressante, presque intemporelle, notamment la première face, parfois plus mélancolique, voire résignée sur sa seconde face (« The Sadness of the Inevitable End »). Love song: Post-Ruins n’affiche qu’une pièce unique, plus lunaire, voire désabusée, erratique, parfois presque immobile, comme un amour en suspension, tout en conservant l’approche mélodique du premier volume, aux antipodes de sa pratique relativement bruitiste de ses autres enregistrements.
C’est cette dernière qu’il met surtout en œuvre dans la confrontation avec son partenaire français, Julien Desprez, dans Boa Tarde , un enregistrement réalisé à Lisbonne en août 2016. Pour nous souhaiter la bonne après-midi ( boa tarde), les deux guitaristes ne trouvent rien de mieux que d’explorer, avec moult gadgets et effets, les sonorités des guitares, dans une sorte de crescendo bruitiste qui débute par un bourdonnement presque discret, très légèrement perturbé avec « Iris », maintenant une pulsion haletante dans « Gracinda », et après une courte accalmie, le final incandescent de « Constança ».
En formant un trio avec le batteur norvégien Andreas Wildhagen et le violoncelliste Valentin Ceccaldi, Luis Lopes nous propose une envolée davantage marquée par la fulgurance rock, une proposition musicale plus décap(it)ante. En effet, Guillotine jette un regard sur la Révolution française, sur ses errements, sur un personnage emblématique (Marie-Antoinette), et sur l’objet symbolique bien sûr, de sorte qu’après une courte entrée percussive plutôt attentiste, les sons giclent, s’entrechoquent, entrent dans le vif d’une description presque apocalyptique menée par des musiciens survoltés, mettant notamment en valeur Valentin Ceccaldi, avec son violoncelle amplifié et ses effets hypnotiques.
PIERRE DURR