DUST

ANTOINE CHESSEX

CAVE12 ORCHESTRA C12 O2

Distribution : Metamkine

CD

 »Il s’agit donc de DUST, une pièce pour trois violons, système de diffusion en quadriphonie et magnétophone à bande (…). L’écriture à proprement parler concerne spécifiquement les violons. Le magnétophone à bande sera joué par Valerio Tricoli (…). Il retravaillera le signal acoustique des violons en direct et le résultat sera diffusé sur quatre haut-parleurs. La partition pour Valerio sera uniquement graphique, lui laissant pas mal de libertés pour traiter les violons en temps réel (…). Concernant les violons, mes connaissances en composition sont très limitées et du coup je travaille avec un matériel réduit, principalement des notes tenues et des glissandi. ». Voilà comment Antoine Chessex décrivait dans notre numéro 82 (interviewé par Jérôme Noetinger) ce qui n’était encore à l’époque (parution en décembre 2009) que l’ébauche de son projet, finalement présenté en janvier 2010 à Berlin et paru en milieu d’année 2011 sur le label Cave 12, responsable entre autres d’un magnifique CD du trio Pateras/Brown/Baxter. Berlin, pièce maitresse qui influencera directement l’élaboration de cette composition pour trois violons (tenus par Elfa Rùn, Ekkehard Windrich et Steffen Tast), un magnéto à bande et des électroniques. Je vous invite donc à vous replonger dans ce numéro de Revue et Corrigée pour saisir son travail, et découvrir l’ampleur de la palette sonore de ce jeune artiste suisse (31 ans), saxophoniste de son état. J’ai découvert sa facette performeur en sax solo chaotique sur le split 45t avec un autre amateur d’un certain chaos, Arnaud Rivière. Mais j’en étais resté là. Bien mal m’en a pris car le jeune homme est un véritable boulimique de la scène en mode trio impro-noise avec Chris Corsano et C Spencer Yeh (et l’on retrouve le violon), ou celui avec Robert Piotrowicz et Zbigniew Karkowski, en mode post metal avec son groupe Monno, ou avec les membres de Knut (groupe post hardcore). C’est en terroriste sonore qu’il intervient en solo, avec un côté Borbetomagus dans l’extension donnée au sax à travers moult effets et surtout un ampli. Brouillage de pistes en perspective. Sauf sur cette pièce où l’on sent les velléités de composition poindre, même si la semblable maltraitance de la matière sonore se ressent. DUST est une pièce de 30 minutes environ qui commence comme du Charles Curtis. Avec quelques épaisseurs en prime. Effectivement c’est de plus en plus brumeux, presque effrayant par la suite. Les variations de la vitesse au magnéto à bande renforcent les dits glissandi des violons, pour vriller encore plus leurs notes continues, les rendant plus abrasives. Toujours sous contrôle, les violons se font de plus en plus stridents, asséchant la matière sonore de départ. Posant les jalons d’un équilibre entre l’impro jouée et la composition, dû en partie au traitement des cordes en direct, pour finalement n’en récupérer que la  »poussière », un drone massif dans les graves tranché par les derniers soubresauts des archets, essoufflés par cet engagement total. Magistral.

CYRILLE LANOË

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